L’EMC au lycée : quelles perspectives nouvelles ?

À partir de la classe de seconde et jusqu’à la classe terminale, l’enseignement moral et civique reprend un certain nombre de thématiques abordées au collège, voire à l'école primaire, en même temps qu’il en aborde de nouvelles et qu’il ouvre des perspectives sur l’organisation institutionnelle de la France, aussi bien en elle-même que dans ses relations avec l’Union européenne (UE) ou avec les organisations internationales d'extension mondiale comme l'Organisation des Nations-Unies (ONU).

Or pourquoi reprendre, à partir de la classe de seconde ou dans les classes conduisant au certificat d'aptitude professionnelle (CAP), des éléments de savoir déjà acquis et donc réputés connus ?

Il faut admettre qu’il y a plusieurs manières d’apprendre et qu'il convient, avançant en âge et en maturité, d’approfondir ce qu’on sait déjà. En quel sens, cependant, « approfondir » ?

En premier lieu, « apprendre », ce n’est pas seulement « accumuler des connaissances ». On dira qu’il s’agit, à partir de la classe de seconde ou en CAP, d’acquérir une connaissance beaucoup plus détaillée d’un certain nombre de sujets abordés de façon relativement succincte pendant les classes du collège ou même avant. Mais ce n’est pas à cela que se résume l’idée d’un approfondissement dans les apprentissages : outre le détail des choses, ce sont les raisons plus complexes des choses qui sont abordées au lycée ou dans les années conduisant au certificat d'aptitude professionnelle. Il s'agit alors d'ouvrir une perspective nouvelle, voire originale, sur ce qui est déjà connu, et non de se contenter d'ajouter des détails à des savoirs plus rapidement abordés pendant les premières années d’apprentissage.

Ainsi « approfondir », c’est :

• apprendre plus : si, en quatrième, on apprend par le fait à connaître les principales instances françaises garantissant l'État de droit, on examine, à partir de la seconde, les fondements du substrat juridique d'une république démocratique et l'on apprend à connaître la nature des idéaux qu'il réalise (voir, par exemple, comment la classe de seconde reprend des sujets « connus » depuis la quatrième) ;
  
• apprendre mieux : la condition civile et politique prévalant dans les sociétés démocratiques résulte de mouvements historiques complexes qu'on s'est accoutumé à examiner et analyser en classe d'histoire. Il convient, au lycée, d'entrer dans l'ordre des raisons, soit pour tenter de faire émerger les soubassements idéologiques des événements politiques déjà connus, soit pour constater que c'est là une tâche impossible à compléter, mais en se donnant les raisons de cette impossibilité – pourquoi la solidarité et même la « fraternité » au fondement de la République française ? et quoi de la place de la France dans un « concert des nations » ? (voir, par exemple, la façon dont la classe de première reprend des thèmes abordés dès le CM2) ;
  
• changer enfin de perspective sur l’objet dont il a été et dont il est à nouveaux frais question : les dernières classes du lycée s'ouvrent à l'enseignement de la philosophie qui vient non pas, comme on disait autrefois, « couronner » les enseignements déjà reçus, mais offrir aux lycéens une perspective exégétique nouvelle sur la réalité, adossée à des traditions conceptuelles qu'ils ne connaissent pas encore. Rien ne dit à cet égard que les élèves engagés dans les voies professionnelles, LP ou CAP, doivent y rester étrangers. Dans tous les lycées et dans les trois années du CAP, les élèves sont légitimement appelés à se familiariser, à travers certaines entrées de l'enseignement moral et civique, à un mode de réflexion philosophique dont ils ont vocation à nourrir par la suite indéfiniment leur existence d'adultes et de citoyens éclairés, qui auront à exprimer et à réaliser en pleine responsabilité et donc en connaissance de cause leurs choix d'idées et d'existence.